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Une saison des pluies 2024 globalement humide est attendue sur la bande sahélienne, avec des dates de démarrage tardives à normales dans le Sahel Central et précoces à moyennes dans le Sahel Ouest et Est, des dates de fin tardives à moyennes, des séquences sèches courtes en début de saison dans le Sahel Ouest et moyennes à longues dans le Sahel Est et globalement longues vers la fin de la saison sur toute la bande sahélienne, et des écoulements globalement supérieurs aux moyennes dans les principaux bassins fluviaux du Sahel.

Ce sont là les informations relayées par le communiqué issu du Forum 2024 des Prévisions Saisonnières des caractéristiques Agro-hydro-climatiques de la saison des pluies pour les zones Soudanienne et Sahélienne de l’Afrique de l’Ouest du Tchad ( PRESASS 2024) qui a été organisé, du 22 au 26 avril 2024 à Abuja au Nigeria, par AGRHYMET Centre Climatique Régional pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (AGRHYMET CCR-AOS) du CILSS, en collaboration avec l’ACMAD, les services nationaux de météorologie et d’hydrologie (SNMH), l’OMM et les Organismes des Grands Bassins fluviaux Ouest africains.

L’ANACIM qui a pris part à l’élaboration de ces prévisions va organiser un atelier de partage avec toutes les parties prenantes pour une mise à jour au niveau national. En attendant, nous vous livrons l’intégralité du communiqué.

I. Synthèses des prévisions

Les prévisions saisonnières sont élaborées sur la base d’analyses de la situation actuelle, des évolutions probables des Températures de Surfaces des Océans (TSO), des modèles statistiques issus des données des SNMH, des connaissances des experts sur les caractéristiques du climat dans la région et des prévisions des grands centres climatiques mondiaux. Les analyses ont permis d’établir les prévisions ci-après, par rapport aux valeurs moyennes de chaque paramètre sur la période de référence 1991-2020.

• Des cumuls pluviométriques moyens à supérieurs aux moyennes sont attendus sur la période Mai-Juin-Juillet 2024 dans la majeure partie de la bande sahélienne, allant des Iles du Cabo Verde au Tchad et sur les parties littorales du Ghana, du Togo, du Benin et du Sud-Ouest Nigeria. Les cumuls seraient inférieurs aux moyennes sur la Sierra-Leone, le Liberia, l’extrême Sud-est du Nigéria, la partie littorale du Cameroun. Ailleurs, les cumuls pluviométriques seraient proches de la normale climatologique.

• Des cumuls pluviométriques supérieurs aux moyennes à équivalents sont attendus sur les périodes Juin-Juillet-Août et Juillet-Août-Septembre 2024, dans les bandes agricoles du Tchad, du Niger, du Mali, de la Mauritanie, sur le Sénégal, la Gambie, le Burkina Faso, la Guinée Bissau et les parties Nord de la Guinée, de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Togo, du Bénin, du Nigéria et du Cameroun. Les cumuls resteraient moyens à supérieurs aux moyennes en Juin-Juillet-Août sur les parties littorales du Ghana, du Togo, du Benin et du Sud-Ouest Nigeria et déficitaires sur la saison en Sierra-Leone, Liberia, et dans l’extrême Sud-est du Nigéria. Ailleurs, les cumuls pluviométriques seraient proches de la moyenne climatologique ;

• Des dates de début de saison normales à précoces sont prévues sur la façade Est de l’Atlantique couvrant le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, la Guinée, le Nord Sierra Léone et les parties Sud de la Mauritanie et du Mali. Ces dates de début de la saison agricole seraient tardives à moyennes dans le Sahel Central couvrant le Sud-est du Mali, le Burkina Faso, la moitié Ouest de la bande agricole et pastorale du Niger, Nord-est de la Cote d’Ivoire, les parties Nord du Ghana, Togo et Benin et le Nord-ouest du Nigeria. Elles devraient être moyennes à tardives dans la partie Est de la bande agricole du Niger, le Nord-est du Nigeria et la zone agricole du Tchad ;

• Des dates de fin de saison globalement tardives à moyennes sont attendues sur les bandes sahélienne et soudanienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad ;

• Des durées de séquences sèches courtes à moyennes sont prévues en début de la saison agricole, sur la partie Ouest des bandes sahélienne et soudanienne de l’Afrique occidentale, notamment sur le Sud Mauritanie, la moitié Sud du Mali, le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, la Guinée, les parties Nord de la Sierra Leone et de la Côte d’Ivoire, et dans les paries Nord-ouest du Ghana et Ouest du Burkina Faso. Sur la moitié Ouest du Burkina Faso, les zones agricoles du Niger et du Tchad, le Nord-est du Ghana et les parties Nord du Togo, du Benin et du Nigeria, les séquences sèches seraient moyennes à longues en début de saison. Vers la fin de la saison, des séquences sèches courtes à moyennes sont attendues sur la façade de l’atlantique couvrant le Sud Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, la Guinée et le Nord Sierra Leone, le Centre du Nigeria et les parties Nord du Benin et du Togo. Les séquences sèches seraient en revanche longues à moyennes dans tout le reste de la zone couvrant le Sud Mauritanie, les parties agricoles du Mali, du Niger et du Tchad, le Burkina Faso et les parties Nord de la Côte d’Ivoire, du Ghana, et du Nigeria.

• Des écoulements globalement équivalents à supérieurs à la moyenne de la période de référence 1991-2020 sont attendus dans l’ensemble des bassins fluviaux de l’Afrique de l’Ouest, exceptés le Niger Inférieur, la Volta Inférieure, le Sassandra et le Mono. De manière spécifique, des écoulements supérieurs aux moyennes sont attendus dans le bassin de la Gambie, le haut bassin du Sénégal (au Mali, au Sénégal et en Guinée), le haut bassin du fleuve Niger (en Guinée, en Côte d’Ivoire et au Mali), le Delta Intérieur du fleuve Niger (au Mali), les portions nigérienne et nigériane du bassin moyen du fleuve Niger, la Komadougou Yobé, le bassin du Logone, le haut bassin de la Volta (en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Togo et au Burkina Faso), la Comoé (en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso) et la Bandama (en Côte d’Ivoire). Des écoulements moyens à supérieurs aux moyennes seraient observés dans le bassin inférieur du fleuve Sénégal (au Sénégal et en Mauritanie), les portions malienne et burkinabé du bassin moyen du fleuve Niger, le bassin du Chari et le bassin de l’Ouémé (Bénin). Le bassin inférieur du fleuve Niger (au Nigéria), intégrant la Bénoué et le bassin du Mono (au Togo et au Bénin), connaitraient des écoulements moyens à inférieurs aux moyennes. Enfin des écoulements inférieurs aux moyennes seraient attendus dans le bassin du Sassandra (en Côte d’Ivoire) et la Volta inférieure (au Ghana).

II. Implications négatives possibles des prévisions saisonnières 2024

Les prévisions saisonnières 2024, bien que présageant des caractéristiques globalement favorables, peuvent aussi avoir des implications négatives à côté ou en lieu et place de celles positives les plus attenues. En effet, dans les zones où il est attendu des cumuls pluviométriques supérieurs aux moyennes, des dates de début de saison précoces, des écoulements supérieurs aux moyennes à équivalents et des séquences sèches courtes, il n’est pas exclu d’observer des situations non commodes qui peuvent par exemple être liées à un excès d’humidité, aux remplissage rapide des zones dépressionnaires et au débordement des cours d’eau, aux remontées des nappes souterraines, à la mauvaise préparation de la campagne agricole et des mouvements de transhumance, à l’impraticabilité des routes, aux difficultés de déplacement et d’accès aux centres d’intérêts vital, économique et sanitaire.

Aussi, dans les zones où il est attendu des dates de début de saison tardives et des séquences sèches longues, il faut s’attendre à une mauvaise répartition des pluies dans le temps et dans l’espace pouvant perturber le développement des cultures et des plantes fourragères, les calendriers culturaux et de transhumance, prolonger la période soudure, exacerber la vulnérabilité des populations et entrainer l’abandon des champs et le départ bras valides.

III. Risques liés aux implications négatives de la saison des pluies

Les risques probables liés aux caractéristiques attendues de la saison des pluies 2024 peuvent être nombreux et variés selon les zones. Le caractère humide de la saison présage des risques importants d’inondations, de submersion donc de réduction des surfaces cultivables, de destruction des infrastructures (habitations, routes, marchés et écoles, etc.), de pertes des cultures et des fourrages, de noyade du bétail et des personnes humaines, de prolifération des germes de maladies hydriques et diarrhéiques (Choléra, Malaria, Dengue, Diarrhée, etc.), de pullulation de ravageurs des cultures, de pollution des eaux, de limitation des déplacements des personnes et des animaux, d’érosion hydrique des sols, d’éboulement, d’ensablement des cours d’eau, de Pullulation de mauvaises herbes, de pertes post-récolte, de pertes en vies humaines et animales, etc.

Dans les zones où les dates de démarrage de la saison des agricoles seraient tardives et les séquences sèches longues, seraient aussi exposées à des risques de persistance de canicules et de vents chauds, de retard dans le retour des transhumants, de pertes de semis et des récoltes, de baisse de rendements agricoles, fourragers et de la pêche, de déficit alimentaire, de complication des crises alimentaires et nutritionnelles, d’inflation et de hausse des prix de denrées alimentaires, d’augmentation de la vulnérabilité, de perte du bétail et de baisse des prix des animaux, etc.
La conjugaison de ces risques climatiques probables avec les situations de pauvreté et de vulnérabilité des populations, pourrait entrainer ou exacerber des situations de conflits fonciers liés à l’utilisation et au changement de l’utilisation des terres, des conflits entre éleveurs et agriculteurs, des conflits autour des infrastructures publiques, les tensions sociales et favoriser le désœuvrement des populations, la mendicité, les tensions sociales, les violences et l’insécurité civile (banditisme, terrorisme, etc.).

IV. Recommandations

1) Par rapport au risque d’inondations Le caractère globalement pluvieux attendu dans les zones soudanienne et sahélienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad et les écoulements à tendance globalement excédentaire prévus dans la majorité des bassins fluviaux du Sahel présagent des risques élevés d’inondations pouvant entrainer des pertes de récoltes, de biens matériels et en vies animales et humaines dans les localités exposées. Pour y faire face, il est recommandé de :
• renforcer la communication des prévisions saisonnières et de leurs mises à jour afin d’informer, sensibiliser les communautés sur les risques et de renforcer leurs capacités à éviter les désastres, en appuyant les efforts de la presse, des plateformes de réduction des risques de catastrophes, des ONG et des SAP des pays,
• renforcer la veille et les capacités d’intervention des agences en charge du suivi des inondations, de la réduction des risques de catastrophes et des aides humanitaires.
• déconseiller et éviter l’occupation anarchique des zones inondables aussi bien par les habitations que par les cultures et les animaux,
• renforcer les digues de protection et assurer la maintenance des barrages et des infrastructures routières ;
• curer les caniveaux pour faciliter l’évacuation des eaux de pluies ;
• suivre de près les seuils d’alerte dans les sites à haut risque d’inondation et entretenir une forte collaboration entre les services hydrologiques et météorologiques afin de permettre une gestion anticipative des inondations dans les zones exposées, notamment au niveau du bassin de la Gambie, du haut bassin du Sénégal (au Mali, au Sénégal et en Guinée), du haut bassin du fleuve Niger (en Guinée, Côte d’Ivoire et au Mali), du Delta Intérieur du fleuve Niger (au Mali), des portions nigérienne et nigériane du bassin moyen du fleuve Niger, de la Komadougou Yobé, du bassin du Logone, du haut bassin de la Volta (en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Togo et au Burkina Faso), de la Comoé (en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso) et de la Bandama (en Côte d’Ivoire) ;
• Limiter les grandes transhumances et éviter le déplacement du cheptel la nuit et de donner la garde des animaux à des enfants ;
• favoriser la culture des plantes adaptées à la persistance des situations d’excès d’eau dans le sol
• maintenir la garde et suivre les mises à jour de ces prévisions saisonnières et les prévisions de courtes et moyennes échéances que produisent et diffusent les services météorologiques et hydrologiques des pays,

2) Par rapport au risque de maladies Les zones humides et celles inondées peuvent être favorables au développement des germes de maladies (Cholera, malaria, dengue, bilharziose, etc). Aussi, les dates de début de saison tardives et les séquences sèches longues à moyennes attendues dans certaines parties du Sahel pourraient occasionner une persistance de hautes températures et des vents de poussières favorables à la prolifération d’autres germes de maladies épidémiques. A cet effet, il est recommandé de :
• renforcer les capacités des systèmes nationaux de santé et des plateformes nationales de réduction de risques de catastrophes,
• diffuser des informations d’alerte sur les maladies à germes climato-sensibles et sensibiliser les populations, avec la collaboration des services de météorologie, des ressources en eau et de santé,
• assainir les agglomérations et éviter le contact avec les eaux contaminées, à travers des opérations de drainage et de curage des caniveaux ;

• prévenir les maladies, en vaccinant les populations et les animaux ;
• prévenir les épizooties à germes préférant de bonnes conditions humides ;
• renforcer la vigilance contre les maladies et les ravageurs des cultures (chenille légionnaire et autres insectes nuisibles) ;

3) Par rapport au risque de sécheresse Dans les zones où il est prévu des séquences sèches longues pouvant entrainer des déficits hydriques, notamment dans le Sahel, il y a un fort risque que la croissance des cultures et des plantes fourragères soit affectée. Pour y faire face, il est recommandé de :
• diversifier les pratiques agricoles, à travers la promotion de l’irrigation et du maraîchage pour réduire le risque de baisse de production ;
• choisir les espèces et variétés de cultures tolérantes au déficit hydrique, dans les zones exposées ;
• adopter des techniques culturales de conservation des eaux et des sols ;
• prévenir la prolifération de la chenille mineuse de l’épi du mil,
• assurer une gestion rationnelle des ressources en eau de surface pour satisfaire les différents usages et prévenir les conflits, notamment au niveau du bassin inférieur du fleuve Niger, y compris la Bénoué (au Nigéria), du bassin du Mono (au Togo et au Bénin), du bassin du Sassandra (en Côte d’Ivoire) et de la Volta inférieure (au Ghana) ; interagir avec les techniciens des services nationaux et régionaux de Météorologie, d’Hydrologie et d’Agriculture pour avoir des informations spécifiques et des conseils en termes de conduites à tenir.

4) Par rapport aux risques de conflits Dans les zones où il est prévu des séquences sèches longues pouvant entrainer des déficits de production agricole et fourragère, il est recommandé de :
• Renforcer les capacités de production, à tous les niveaux et sur tous les maillons, en promouvant l’utilisation efficace de stratégies adéquates d’adaptation, d’augmentation des rendements et de résilience des différents systèmes agro-sylvo-pastoraux de production ;
• Sensibiliser et créer les conditions pour une gestion inclusive, non discriminatoire et équitable des infrastructures publiques et des ressources productives, environnementales et socio-économiques ;
• Favoriser la création d’emplois, l’entreprenariat privé et promouvoir des activités génératrices des revenus, nomment pour les groupes les plus vulnérables, en particulier les jeunes, pour résorber le désœuvrement et assurer un développement harmonieux et durable, du niveau local aux niveaux national et régional. Ceci permettra entre autres de créer les conditions idoines pour renforcer le rattachement des populations à leur terroir ;
• Créer et développer des infrastructures de base et améliorer les moyens d’existence des communautés.

5) Recommandations pour mieux tirer profit de la saison des pluies Au regard de la configuration de la saison des pluies 2024 présageant une situation globalement humide dans les zones soudanienne et sahélienne de l’Afrique de l’Ouest du Tchad, il est recommandé aux agriculteurs, éleveurs, gestionnaires des ressources en eau, Projets, ONG et aux autorités de :
• valoriser les situations d’écoulements moyens à supérieurs aux moyennes, en développant des cultures irriguées notamment dans les plaines inondables, au niveau du bassin inférieur du fleuve Sénégal (au Sénégal et en Mauritanie), des portions malienne et burkinabé du bassin moyen du fleuve Niger, du bassin du Chari et du bassin de l’Ouémé (Bénin) ;
• investir davantage dans les cultures à hauts rendements tolérantes vis-à-vis des conditions humides (riz, canne à sucre, tubercules, etc.),
• mettre en place des dispositifs de collecte et de conservation des eaux de ruissellement pour des usages agricoles et domestiques en saison sèche,
• soutenir le déploiement de techniques climato-intelligentes d’augmentation des rendements des cultures et des fourrages, face aux risques climatiques, notamment ceux liés aux excès d’eau de pluies et à la sècheresse,
• renforcer les dispositifs d’information, d’encadrement et d’assistance agro-hydro météorologiques des producteurs ;
• faciliter aux producteurs l’accès à des semences améliorées et des intrants agricoles adaptés à leurs besoins ;
• sécuriser les revenus et alléger les pertes agricoles, à travers la promotion et la souscription à des assurances agricoles indicielles ;

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