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Le Forum 2025 des Prévisions Saisonnières des caractéristiques Agro-hydro-climatiques de la saison des pluies pour les zones Soudaniennes et Sahéliennes de l’Afrique l’Ouest (PRESASS, 2025) a été organisé, du 21 au 25 avril 2025 à Bamako au Mali. La délégation du Sénégal était composée d’agents de l’ANACIM et de la Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE). L’ANACIM organisera au début du mois de Mai un atelier de partage pour la mise à jour au niveau national.
Nous vous proposons l’intégralité du communiqué final issu des travaux :

Une saison des pluies globalement humide est attendue en 2025, avec des dates de démarrage précoces à normales sur la bande sahélienne et normales à tardives dans la zone soudanienne Centre, des dates de fin tardives à moyennes, des séquences sèches longues à moyennes dans le Sahel Centre et Est et des écoulements supérieurs aux moyennes dans les principaux bassins fluviaux du Sahel.

Le PRESASS 2025 a été organisé, du 21 au 25 avril 2025 à Bamako au Mali, par AGRHYMET Centre Climatique Régional pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (AGRHYMET CCR-AOS) du CILSS, en collaboration avec l’ACMAD, les services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN), l’OMM et les Organismes des Bassins Fluviaux de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

I. Synthèses des prévisions

Les prévisions saisonnières sont élaborées sur la base d’analyses de la situation actuelle, des évolutions probables des Températures de Surfaces des Océans (TSO), des modèles statistiques issus des données des SMHN, des connaissances des experts sur les caractéristiques du climat dans la région et des prévisions des grands centres climatiques mondiaux. Les analyses ont permis d’établir les prévisions ci-après, par rapport aux valeurs moyennes de chaque paramètre clé de la saison agricole sur la période de référence 1991-2020.

• Des cumuls pluviométriques moyens à supérieurs sont attendus sur les périodes Mai-Juin-Juillet et Juin-Juillet-Août 2025 sur presque toute la bande sahélienne, allant du Sénégal au Tchad et sur les parties littorales du Libéria. Les cumuls seraient inférieurs aux moyennes dans la partie Sud du Sénégal, en Gambie, dans le Nord de la Guinée et sur les parties littorales du Nigéria, Benin, Togo et Ghana. Ailleurs, les cumuls pluviométriques seraient proches de la normale climatologique, sur ces périodes.

• Des cumuls pluviométriques supérieurs aux moyennes de la période de référence sont attendus en Juillet-Août-Septembre 2025, dans les bandes agricoles du Tchad, du Niger, du Mali, de la Mauritanie, au Burkina Faso, en Gambie, en Guinée Bissau et dans les parties Nord de la Guinée, de la Côte d’Ivoire, du Ghana, du Togo, du Bénin et du Nigéria. Les cumuls seraient toutefois moyens à inférieurs aux moyennes, sur cette deuxième moitié de la saison agricole, au Sénégal et dans les parties littorales du Ghana, du Togo, du Benin et du Nigeria. Ailleurs, les cumuls pluviométriques seraient proches de la moyenne climatologique ;

• Des dates de début de saison précoces à normales sont prévues sur la bande sahélienne couvrant le Centre-sud du Tchad, la bande agricole du Niger (excepté l’extrême Sud-Ouest), les parties extrêmes Nord du Nigeria et du Burkina Faso, le Centre et le Nord-ouest de la bande agricole du Mali, le Sud Mauritanie et le Nord-ouest du Sénégal. Les dates de début de saison seraient plutôt normales à tardives dans les parties Centre-nord du Nigéria, le Sud-ouest du Niger, le Burkina Faso (sauf dans l’extrême Nord), le Sud Mali, le Sud Guinée et dans les parties Nord du Benin, du Togo, du Ghana et de la Côte d’Ivoire. Elles seraient tardives à normales dans l’extrême Sud du Tchad, le Centre et Nord Guinée, le Nord Sierra Leone, en Guinée Bissau et dans les parties littorales de la Gambie et du Sénégal ;

• Des dates de fin de saison globalement tardives à moyennes sont attendues sur toutes les bandes sahélienne et soudanienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad ;

• Des durées de séquences sèches courtes à moyennes sont prévues en début de la saison agricole, sur le Sud Tchad et dans le Sahel Ouest couvrant le Nord Libéria, la Sierra Léone, la Guinée, la Guinée Bissau, la Gambie, le Sénégal, le Sud Mauritanie et la bande agricole du Mali (excepté l’extrême Sud). Ces séquences seraient plus courtes à normales dans le Nord Côte d’Ivoire Le Sud Mali, les Centre et le Sud Burkina Faso et dans les parties extrêmes Nord du Ghana, du Togo et du Benin. Ailleurs, dans le Nord Nigeria, sur la bande agricole du Niger l’extrême Nord du Burkina Faso, l’Ouest Mali et dans les parties Centre nord du Ghana, du Togo et du Benin, elles seraient plutôt longues à normales. Vers la fin de la saison, des séquences sèches longues à moyennes sont attendues sur toutes les bandes sahélienne et soudanienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad, sauf sur la façade atlantique couvrant le Nord Liberia, la Sierra Leone, la Guinée, la Guinée Bissau, le Sénégal et la Gambie.

• Des écoulements globalement équivalents à supérieurs à la moyenne de la période de référence 1991-2020 sont attendus dans la plupart des bassins fluviaux de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel. De manière spécifique, ils seraient excédentaires dans le haut bassin du Sénégal (en Guinée, au Mali et au Sénégal), le haut bassin du fleuve Niger (en Guinée, en Côte d’Ivoire et au Mali), le Delta Intérieur du Niger (au Mali), le Niger moyen (au Niger, au Burkina Faso, au Bénin et au Nigéria), la Komadougou Yobé (au Niger), le Chari et le Logone Inférieur (au Tchad), le haut bassin de la Volta (au Mali, au Burkina Faso, au Bénin, au Togo, au Ghana et en Côte d’Ivoire), le bassin de l’Ouémé (au Bénin) et le haut bassin de la Comoé (au Burkina et en Côte d’Ivoire). Ils seraient moyens à excédentaires dans le bassin de la Gambie (en Gambie et au Sénégal), le bassin inférieur du fleuve Sénégal (au Sénégal et en Mauritanie), la portion malienne du bassin moyen du fleuve Niger, la partie sud du Niger moyen (au Nigéria) et le haut bassin du Logone (au Tchad). Par contre, il est attendu que les écoulements soient moyens à déficitaires dans les bassins de la Bandama et du Sassandra (en Côte d’Ivoire), du Mono (au Togo et au Bénin), de la Bénoué (au Nigéria et au Tchad), du Delta Inférieur du Niger (au Nigéria), de la Comoé Inférieure (en Côte d’Ivoire), de la Volta inférieure (au Ghana), et déficitaires dans le bassin du Cavally (en Côte d’Ivoire).

II. Implications négatives possibles des prévisions saisonnières 2025

Les prévisions saisonnières 2025, bien que présageant des caractéristiques globalement favorables, peuvent avoir des implications négatives. En effet, dans les zones où il est attendu des cumuls pluviométriques supérieurs aux moyennes, des dates de début de saison précoces, des écoulements supérieurs aux moyennes à équivalents et des séquences sèches courtes (ou même longues), il n’est pas exclu d’observer des situations d’excès d’humidité pour les cultures, de remplissage rapide des zones dépressionnaires, de ruissellements érosifs et dangereux et de débordement des cours d’eau. Ces situations pourraient rendre plus difficiles les déplacements des personnes et des animaux ainsi que l’accès aux centres d’intérêts vitaux, économiques et sanitaires, notamment dans les zones d’insécurité civile.

Aussi, dans les zones où il est attendu des dates de début de saison tardives et des séquences sèches longues, il faut s’attendre à une mauvaise répartition des pluies dans le temps et dans l’espace pouvant perturber les calendriers culturaux, le développement des cultures et des plantes fourragères et les mouvements de transhumance. Cette situation pourrait également prolonger la période de soudure, exacerber la vulnérabilité des populations et entrainer l’abandon de champs et le départ des bras valides en exode.

III. Les risques probables liés à la saison des pluies 2025

Les risques possibles peuvent être nombreux et variés, selon les zones. En effet, le caractère humide de la saison présage des risques importants d’inondations, de submersion des surfaces cultivables, de dégâts sur les cultures et les fourrages, de pertes en vies animales et humaines, de destruction d’infrastructures (notamment, les routes, les réseaux électriques, les marchés, les écoles, les centres de santé, les lieux de cultes, les cimetières et les biens matériels ), de prolifération des germes de maladies hydriques et diarrhéiques, de pullulation de ravageurs des cultures, d’éboulement, d’ensablement des cours d’eau et de pullulation de mauvaises herbes, de pertes poste-récoltes, etc.

Les zones, où les dates de démarrage de la saison agricole seraient tardives et les séquences sèches longues, seraient aussi exposées à des risques de persistance de canicules et de vents chauds pouvant rendre plus difficile la période de soudure, entrainer des pertes de semis, des baisses de rendements agricoles et exacerber l’inflation, la hausse des prix des denrées alimentaires, la baisse des prix des animaux et les situations de crises alimentaires et nutritionnelles.

La conjugaison de ces risques climatiques probables avec les situations liées à l’insécurité civile, à la pauvreté des populations et à la vulnérabilité des ménages pourrait entrainer des tensions sociales, des conflits fonciers, des conflits entre éleveurs et agriculteurs, des conflits autour des infrastructures publiques et favoriser le désœuvrement des populations, la mendicité, le banditisme, les violences, le terrorisme, etc.

IV. Recommandations

1) Par rapport au risque d’inondations

La situation globalement humide attendue dans la zone sahélienne de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad et les écoulements excédentaires prévus dans la majorité des bassins fluviaux de cette même zone présagent des risques élevés d’inondations pouvant entrainer des pertes et dégâts énormes dans les localités exposées. Pour y faire face, il est recommandé de :

• renforcer la communication des prévisions saisonnières afin d’informer et sensibiliser les communautés sur les risques
• renforcer les capacités des communautés à éviter les désastres, en appuyant les efforts de la presse, des plateformes de réduction des risques de catastrophes, des ONG et des SAP des pays,
• renforcer la veille et les capacités d’intervention des agences en charge du suivi des inondations et des aides humanitaires.
• déconseiller et éviter l’occupation anarchique des zones inondables par les habitations, les cultures et les animaux,
• renforcer les digues de protection et assurer la maintenance des barrages et des infrastructures routières ;
• curer les caniveaux pour faciliter l’évacuation des eaux de pluies ;
• suivre les seuils d’alerte dans les sites à haut risque et entretenir une forte collaboration entre les services hydrologiques et météorologiques afin de permettre une gestion anticipative des inondations dans les zones exposées,
• limiter les grandes transhumances et éviter le déplacement du cheptel sans surveillance adéquate ;
• favoriser la culture des plantes adaptées à la persistance des situations d’excès d’eau dans le sol ;
• suivre les mises à jour de ces prévisions saisonnières et les prévisions de courtes échéances que produisent et diffusent les services météorologiques et hydrologiques des pays et AGRHYMET CCR-AOS.

2) Par rapport au risque de maladies

Les zones humides et celles inondées peuvent être favorables au développement des germes de maladies (Cholera, malaria, dengue, bilharziose, etc). Aussi, les dates de début de saison tardives et les séquences sèches longues attendues dans certaines parties du Sahel pourraient occasionner une persistance de hautes températures et des vents de poussières favorables à la prolifération d’autres germes de maladies épidémiques. A cet effet, il est recommandé de :

• diffuser des informations d’alerte sur les maladies à germes climato-sensibles et sensibiliser les populations, en collaboration avec les services de météorologie, d’hydrologie et de santé,
• renforcer les capacités des systèmes nationaux de santé et des plateformes nationales de réduction de risques de catastrophes,
• assainir les agglomérations et éviter le contact avec les eaux contaminées, à travers des opérations de drainage et de curage des caniveaux ;
• prévenir les maladies, en vaccinant les populations et les animaux ;
• prévenir les épizooties à germes préférant de bonnes conditions humides ;
• renforcer la vigilance contre les maladies et les ravageurs des cultures ;

3) Par rapport au risque de sécheresse

Dans les zones où il est prévu des séquences sèches longues pouvant entrainer des déficits hydriques et affecter la croissance des cultures et des plantes fourragères, il est recommandé de :
• promouvoir l’irrigation et le maraîchage pour réduire le risque de baisse de production ;
• choisir les espèces et variétés de cultures tolérantes au déficit hydrique ;
• adopter des techniques culturales climato-intelligentes ;
• prévenir la prolifération de la chenille mineuse de l’épi du mil,
• assurer une gestion rationnelle des ressources en eau de surface pour satisfaire les différents usages et prévenir les conflits ;
• interagir avec les techniciens des services nationaux et régionaux de Météorologie, d’Hydrologie et d’Agriculture pour avoir des informations spécifiques et des conseils adéquats.

4) Par rapport aux risques de conflits

Dans les zones où il est prévu des séquences sèches longues pouvant entrainer des déficits de production agricole et fourragère, il est recommandé de :
• renforcer les capacités de production à la base, en promouvant l’utilisation de stratégies adéquates d’adaptation, d’augmentation des rendements et de résilience des systèmes agro-sylvo-pastoraux de production ;
• créer et entretenir les conditions pour une gestion inclusive, non discriminatoire et équitable des insfratucures publiques et des ressources productives, environnementales et socio-économiques ;
• favoriser la création d’emplois, l’entreprenariat privé et promouvoir des activités génératrices des revenus, notamment pour les femmes et les jeunes, pour résorber le désœuvrement. Ceci permettra de renforcer le rattachement des populations à leur terroir et de diminuer les migrations et les départs massifs en exode ;
• développer des infrastructures de base, améliorer les moyens d’existence des communautés et sécuriser les travaux des agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, etc. afin de leur permettre de mieux tirer profit de la campagne agricole à venir, notamment dans les zones d’insécurité civile.

5) Recommandations pour mieux tirer profit de la saison des pluies

Au regard de la configuration globalement humide de la saison des pluies 2025 dans la zone sahélienne de l’Afrique de l’Ouest du Tchad, il est recommandé aux agriculteurs, éleveurs, gestionnaires des ressources en eau, Projets, ONG et aux autorités de :
• valoriser les situations d’excès d’eau à travers le développement des cultures irriguées notamment dans les plaines inondables ;
• investir davantage dans les cultures à hauts rendements tolérantes vis-à-vis des conditions humides (riz, canne à sucre, tubercules, etc.),
• mettre en place des dispositifs de collecte et de conservation des eaux de pluies pour des usages agricoles et domestiques en saison sèche,
• soutenir le déploiement de techniques climato-intelligentes d’augmentation des rendements des cultures et des fourrages, face aux risques climatiques ;
• renforcer les dispositifs d’information, d’encadrement et d’assistance agro-hydro-météorologiques des producteurs ;
• faciliter aux producteurs l’accès à des semences améliorées et des intrants agricoles adaptés à leurs besoins ;
• sécuriser et motiver les producteurs à exploiter largement des superficies cultivables pour augmenter la production agricole, notamment dans les zones d’insécurités civile,
• sécuriser les revenus et alléger les pertes agricoles, à travers la promotion et la souscription à des assurances agricoles indicielles.
Il est recommandé aux utilisateurs des différents secteurs d’être attentifs aux mises à jour de ces prévisions saisonnières qui seront faites par AGRHYMET CCR-AOS et les services météorologiques et hydrologiques nationaux, tout au long de la saison.

Fait à Bamako le 25 avril 2025
Le Forum

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